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Clarifier les résultats dans la gestion publique

Il n’y a pas de responsabilité dans la gestion publique sans une obligation de rendre des comptes. Le principe de reddition des comptes, pour porter ses fruits, doit bien sûr s’appuyer sur des informations objectives : le seul témoignage des responsables évalués ne saurait suffire. S’étend ici un vaste champ qui va de la définition d’objectifs quantifiés, la conception d’indicateurs de performance au niveau des services, les comparaisons de services publics comparables en Belgique ou à l’étranger (benchmarking), l’amélioration des statistiques, l’exercice effectif et transparent du contrôle par les autorités de tutelle, les commissaires du gouvernement et les réviseurs, jusqu’à l’évaluation des politiques publiques, un domaine où la Belgique accuse un retard sérieux. L'exemple des politiques de l’emploi est frappant. Primo, il n'y a pour ainsi dire aucune évaluation ex ante. Secundo, les évaluations des effets ex post sont bien rares. Lorsqu’elles existent, les évaluations sont pour la plupart souvent écrites par des partisans affirmés de la politique adoptée. Ces études reposent sur un dénombrement des bénéficiaires du programme. Cette façon de faire est inacceptable, car le succès d’une politique ne se mesure pas aux nombres de bénéficiaires. Il importe en effet de savoir combien de bénéficiaires auraient été de toute façon embauchés sans cette politique (effet d’aubaine) et le nombre de bénéficiaires qui trouvent un emploi à l’issue du contrat de première embauche (taux d’insertion). En fait pour évaluer l’effet d’une politique de l’emploi, il faut se demander si les perspectives d’emploi des bénéficiaires sont en moyenne meilleures que celles des non-bénéficiaires. Cette pauvreté de l’évaluation des politiques publiques est à la fois le reflet du désintérêt des universités et le manque de demande d’évaluation de la part de l’Etat. Les administrations ont le plus souvent leurs propres services d’études qui gardent jalousement leurs données. Chaque service est en rivalité avec les autres administrations, pour conserver le contrôle sur des données qu’ils assimilent à une forme de pouvoir dans le rapport de force politique. Enfin la formation générale des élites de l’administration est peu propice à la consommation de travaux d’évaluation de politique publique de qualité. On s’en doute, les résistances à l’objectivation des résultats sont nombreuses. Les assemblées démocratiques sont aujourd’hui trop souvent dans l’incapacité d’exercer le moindre contrôle sur l’efficience des services publics et les résultats effectifs des politiques mises en oeuvre. Elles peuvent certes s’enquérir des réalisations, mais rarement du rapport entre les coûts et les réalisations, et elles dépendent pour l’essentiel des informations fournies par ceux-là mêmes qu’elles cherchent à évaluer, en l’absence d’expertises externes.

Recommandation:

  • Entreprendre une véritable politique d’évaluation des politiques publiques, en constituant une ou des structures vraiment indépendantes, dont la compétence est reconnue par tous et au sein desquelles toutes les sensibilités politiques et intellectuelles puissent être représentées.
  • Doter chaque ministère d’un budget spécifique pour évaluer les réformes.
  • Recourir plus intensivement aux enquêtes de satisfaction auprès des usagers. Rendre accessible gratuitement les données publiques, dont la collecte mobilise l’argent public.
  • Impliquer les universités dans l’évaluation et assurer la pluralité des évaluations.
  • Le caractère décentralisé de notre fédéralisme belge offre des perspectives d’évaluation intéressantes en permettant de comparer les effets de mesures différentes prises dans des juridictions différentes comme les analystes le font de manière routinière dans d’autres systèmes fédéraux. Si nos Régions ont des compétences de plus en plus larges (et le transfert des compétences ne semble pas être achevé), elles devraient être encouragées, au besoin par une dotation ad hoc, à lancer des expérimentations locales sur les politiques
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