Vers l'aperçu

Jusqu’où nous entraînera la crise?

Il y a quatre-vingts ans, le monde subissait le plus grand effondrement du système économique de l’histoire moderne. Personne n’avait cru que cela serait possible, mais c’est pourtant bel et bien arrivé.



La production industrielle a chuté de presque 40% au niveau mondial, les marchés boursiers ont perdu 70% et le volume du commerce mondial a baissé de 30%.



En 2009, le compteur de certains de ces indicateurs, comme le commerce mondial, était encore plus bas qu’à des moments comparables pendant la Grande Dépression. Mais la durée de la crise conférait à la situation dans les années 30 un air encore plus désespéré. La vie dans les marchés économiques n’a repris qu’après quatre ans.



La grande différence avec la situation il y a huit décennies, c’est qu’à l’époque, les moralistes qui avançaient que l’économie devait être épurée par une grave récession suite aux excès, l’emportaient.



Ces soi-disant «liquidationnistes» affirmaient que chaque tentative pour empêcher la dépression ne ferait qu’entraîner une dépression encore plus grave par la suite. Le fait que nous ayons agi autrement cette fois est dû à la profonde impression qu’a laissée la catastrophe d’il y a quatre-vingts ans, ainsi qu’à l’étude des causes de la dépression.



Un ouvrage qui fait particulièrement autorité est celui de Milton Friedman et Anna Schwartz. Ils sont arrivés à la conclusion que c’est surtout le refus de mettre en oeuvre la politique monétaire qui a laissé au monde un goût amer.



Cela ne signifie pas que nous pouvons dormir sur nos deux oreilles aujourd’hui, rien que parce que nous avons agi autrement que

«la dernière fois». En effet, l’intervention comme la stabilisation du système économico-financier font inévitablement surgir de nouveaux risques. Ce qui ne veut pas dire que nous avons fait le mauvais choix stratégique. Il s’agit plutôt du fait que nous devons mieux combiner les options fondamentales avec les mesures d’accompagnement.



Nous avons par conséquent bien fait de faire appel aux pompiers, même si l’incendie a été provoqué par des parties qui ont pris des risques injustifiables, comme fumer au lit.



Il va falloir se salir…



Une crise de confiance implique que le troupeau veut transformer collectivement ses investissements non liquides en liquidités.



La situation devient vraiment critique lorsque la banque centrale apporte aussi son soutien à des établissements qui n’ont pas purement et simplement un problème de liquidités temporaire, mais qui sont devenus fondamentalement insolvables. Le risque est alors grand que la banque centrale doive inscrire des pertes à ses postes de soutien. Ces pertes peuvent alors être réglées par une recapitalisation de la banque centrale par le Trésor public. Les autorités devront par conséquent durcir leur politique budgétaire, par exemple

en imposant des impôts plus élevés à la population.



S’il n’yapas de soutien social à cet effet, on voit apparaître le risque que la banque centrale doive monétiser les pertes, ce qui entraîne une inflation.



Fondamentalement, les autorités monétaires doivent toutefois bien comprendre qu’elles devront dès lors se salir les mains et les pieds. La doctrine stipulant que nous ne pouvons pas crever la bulle, mais que nous réparerons les dégâts par la suite, s’est avérée

intenable.



D’innombrables gourous disent que les investisseurs risquent de laisser échapper des gains boursiers s’ils ne prennent pas le train en marche maintenant. Ils basent cependant essentiellement leur recommandation d’achat sur le taux

d’intérêt bas actuel. Celui-ci est toutefois la conséquence de la réponse politique après la fin manifeste de la petite fête passée.



Aussi, nous sommes dès aujourd’hui voués à tester si la banque centrale est en mesure de donner des signaux politiques forts pour mettre fin à la fête, avant qu’elle ne dégénère. Elle peut le faire par des avertissements verbaux, mais la créativité ne doit pas

s’arrêter là.