Vers l'aperçu

Le surréalisme à la belge des promesses électorales

Au vu des promesses électorales, tous partis confondus, la trajectoire de la SA Belgique est celle d'un train qui avance au ralenti vers le précipice.


Nous sommes à moins de trois mois des élections fédérales qui, selon les sondages, plongeront notre pays dans la discorde et la polarisation. Si l'extrême droite en Flandre et l'extrême gauche en Wallonie l'emportent, nous nous retrouverons au niveau fédéral avec une alliance monstrueuse de perdants ou une incapacité à gouverner.

Toute tentative de formation d'un gouvernement sera alors éclipsée par les vainqueurs exclus: par le "notre peuple d'abord" en Flandre et par la " révolte " anticapitaliste en Wallonie. Si ce scénario se concrétise, notre pays sera confronté à un moment de vérité prédit depuis longtemps, mais jamais encore réalisé.

La trajectoire de SA Belgium est celle d'un train qui avance au ralenti vers le précipice. Ce précipice est le résultat de décennies de politiques de procrastination: le vieillissement démographique, la pénurie de talents, l'immigration de masse mal gérée, le casse-tête des soins de santé, les budgets exsangues, la surréglementation, l'État de droit qui ne cesse de se détériorer, l'improvisation en matière d'énergie, et j'en passe.

Le puits se creuse et les parois s'effritent. Le désinvestissement et la désindustrialisation sont visibles. Les déficits budgétaires approchent des niveaux d'alerte. Les nouveaux besoins en matière de sécurité, de défense et de climat requièrent de nombreux milliards additionnels qui font défaut.

Nulle trace dans les programmes des efforts à accomplir

À l'aune de cette réalité, la campagne électorale reste pour l'essentiel un exercice de surréalisme à la belge. Aucun parti ne peut ou ne veut gagner des électeurs avec du sang, de la sueur et des larmes. Les politiques de relance et les sacrifices qu'elles impliquent ne figurent nulle part en tête des priorités.

La droite veut ralentir le train en marche, mais n'ose pas appuyer sur le frein d'urgence. La gauche modérée cherche du carburant afin de permettre au train de franchir le précipice. L'extrême gauche nie l'existence d'un gouffre et voit les rails s'élever jusqu'au ciel. L'extrême droite veut débrancher ou faire dérailler le train.

Il est étonnant que peu d'attention soit portée à ce qui serait le plus judicieux pour le train déconnecté: comment combler le ravin par un nouveau dynamisme, une nouvelle prospérité, des investissements et de la croissance?

Au moment où l'Union européenne se lance à corps perdu dans la transition énergétique, l'autonomie industrielle, le leadership technologique et la relance de la défense - autant de programmes colossaux d'investissement - nous manquons, en Belgique, d'une vision en matière d'investissement. Au mieux, il y a quelques ballons d'essai qui circulent à propos des dépenses ou de la fiscalité, généralement remplis d'un volontarisme idéologique qui se dégonfle à chaque confrontation lors de la formation d'une coalition.

Relancer tous azimuts la machine économique

Il n'est toutefois pas facile de mettre en place un programme d'investissement en plus des mesures d'assainissement des finances publiques. Dans les années 1980, le redressement budgétaire avait été amorcé par une diminution systématique des investissements publics, qui n'ont jamais été augmentés par la suite. Mais c'est tout aussi difficile. Il faut simplifier radicalement la réglementation, les permis et les procédures. Optimiser l'activation du marché du travail, notamment en transformant les prestations en subventions salariales. Réformer en profondeur les nombreuses subventions accordées aux entreprises. Récompenser l'investissement par une fiscalité favorable à la croissance. Et avec les banques, les assureurs et les fonds de pension, mobiliser l'épargne vers des priorités stratégiques avec des rendements à long terme.

Tous les partis traditionnels sont depuis des années, voire des décennies, des co-machinistes et des poseurs de rails du train de l'État. Si le précipice doit interpeller quelqu'un, c'est bien ceux qui ont laissé courir le vieillissement, fait dérailler la dette, joué à la roulette avec l'énergie nucléaire, laissé se dégrader les quartiers immigrés et permis à la pratique politique de glisser vers le culte des personnes et la politique de l'embrasement.

Le surréalisme belge, c'est peut-être aussi cela: le train tombe dans le vide, mais les conducteurs restent au volant. Maintenu à flot par une Union européenne qui nous oblige à faire le ménage alors que personne ne vote pour elle ni n'en prend la responsabilité.